Les élèves du Collège André Abbal trouveront sur ce blog les reproductions des oeuvres étudiées en classe dans le cadre de l'Histoire des Arts. Ils retrouveront également ici les thématiques grâce auxquelles les oeuvres ont été étudiées ainsi que quelques éléments d'analyse d'oeuvre.
HISTOIRE DES ARTS : 4°
Arts, société, féminin/masculin
Place et représentation de la femme dans l’art et la société du 18ème au 19ème siècle.
I/ Identification
Eugène Delacroix (1798–1863)
Le 28 Juillet. La Liberté guidant le peuple
(28 juillet 1830)
Salon de 1831
Huile sur toile
H. : 2,60 m. ; L. : 3,25 m
Musée du Louvre, Paris
Mouvement artistique : le Romantisme
II/ Description
E. Delacroix représente un évènement historique célèbre : la révolution du 27,28,29 Juillet 1830 à Paris, ou les Trois Glorieuses qui vit la chute de Charles X et l'arrivée au pouvoir de Louis-Philippe. Témoin de l'évènement, Delacroix, y trouve un sujet moderne qu'il traduit méthodiquement en peinture avec sa ferveur romantique habituelle.
L’événement qui change le cours de l'histoire et inverse les rapports de force artistiques, exalte l'imagination de Delacroix et le plonge dans une émotion profonde qui s'exprime aussitôt dans la peinture d'une manière personnelle et chaque fois renouvelée. L'ampleur qu'il donne à la colère de la rue qui vient d'exploser à Paris est encore en grande partie due à ce tempérament.
La palette des couleurs : les corps sont traités dans des bruns plus ou moins clairs, favorisant ainsi les contrastes de valeurs, ce qui renforcent la dimension dramatique de la scène. Les couleurs du drapeau : bleu, blanc, rouge sont les trois couleurs vives qui ressortent. Ces couleurs se retrouvent également à plusieurs endroits dans la composition, dans les vêtements et créent ainsi un rythme qui guide le regard du spectateur dans la toile. La couleur unifie le tableau. Leur valeur est expressive et symbolique : ce sont les couleurs de la Révolution.
La lumière du soleil couchant qui se mêle à la fumée des canons et qui révèle le mouvement baroque des corps, éclate au fond à droite et sert d'aura à la liberté, au gamin et au drapeau.
L'artiste a choisis ici de peindre la foule franchissant les barricades et son assaut final dans le camp adverse.
L'essentiel dans cette œuvre est la force d'expression plastique et épique qu'il fait ressortir grâce à la représentation et
l'interprétation qu'il fait de cet instant.
La composition : l'élan porté à son paroxysme par la victoire s'inscrit dans un plan pyramidal dont la base jonchée de cadavres est comme un
piédestal sur lequel s'élève l'image des vainqueurs. Ce procédé de composition rigoureux, utilisé par Géricault dans Les Naufragés de la Méduse contient et équilibre la touche
emportée du peintre et le rythme impétueux de la scène.
Schéma de composition du tableau :
III/ Signification : une allégorie. (Rappel:définition d’une allégorie : En Arts Plastiques, c’est la représentation d’une idée abstraite ou d’une notion morale sous la forme d’une figure humaine)
L'artiste propose par cette œuvre une allégorie moderne puissante et originale au point qu'elle a fini par s'imposer, dans l'imaginaire collectif, comme l'image même de la Liberté en marche.
Les personnages:
- La Liberté est ici incarnée par une fille du peuple coiffée du bonnet phrygien, les mèches
flottant sur la nuque, vivante, fougueuse, révoltée et victorieuse. L'allégorie de la Liberté évoque la Révolution de 1789, les sans-culottes et la souveraineté du peuple. Le drapeau, bleu,
blanc, rouge, symbole de lutte, mêlé à son bras droit, se déploie en ondulant vers l'arrière du plus sombre au plus lumineux, comme une flamme.
Serré par une double ceinture aux bouts flottant sur le côté, l'habit jaune qu'elle porte rappelle les drapés antiques. En glissant au-dessous des seins, il laisse voir la peau d'une déesse
devant être lisse. Exceptionnelle parmi les hommes, le regard déterminé, le corps profilé et éclairé, la tête tournée vers eux, elle les stimule vers la victoire finale. Son flanc droit sombre se
détache sur la fumée. Elle a une position dynamique : elle est appuyée sur son pied gauche nu, dépassant de la robe. Elle est dans « le feu de l'action ». L'allégorie participe à un
réel combat. Le fusil à baïonnette d'infanterie, modèle 1816, à la main gauche, la rend vraisemblable, actuelle et moderne.
- Deux gamins de Paris, engagés spontanément dans la bataille sont, l'un à gauche, agrippé aux pavés, les yeux dilatés sous le bonnet de police des voltigeurs de la garde; l'autre, le plus célèbre, à droite devant La Liberté, est le symbole de la jeunesse révoltée par l'injustice et du sacrifice pour les causes nobles. On lui associe Gavroche avec son béret de velours noir des étudiants, signe de leur révolte. Avançant de face, un sac en bandoulière, les pistolets de cavalerie aux mains, le pied droit en avant, le bras levé, le cri de guerre à la bouche, il exhorte au combat les insurgés.
- Le combattant portant un béret avec cocarde blanche des monarchistes et nœud de ruban rouge des libéraux ainsi qu'une banderole blanche et sabre des compagnies d'élite d'infanterie modèle 1816 est un ouvrier manufacturier. Il a un foulard qui retient son pistolet sur le ventre.
- L'homme à genoux au chapeau haut de forme de bourgeois ou de citadin à la mode, peut-être Delacroix ou un de ses amis, porte des pantalons larges et une ceinture de flanelle rouge d'artisan; l'arme est un fusil de chasse.
- Celui qui saigne sur le pavé et se redresse à la vue de la Liberté, porte noué sur la tête un foulard; avec sa blouse et sa ceinture de flanelle rouge de paysan, il rappelle les employés temporaires à Paris. Le gilet bleu, l'écharpe rouge et sa chemise répondent aux couleurs du drapeau.
- Les soldats, allongés au sol, occupent le premier plan à la base de la structure pyramidale.
Dans le fond, ce trouve un paysage urbain reconnaissable. Les tours de Notre Dame situent l'action à Paris.
L'œuvre de Delacroix semble contradictoire avec ses opinions politiques. Il était apprécié de Charles X qui lui a acheté certaines de ses œuvres. Il aimait attirer l'attention de l'autorité et
frapper l'opinion mais considéré alors comme chef de file du mouvement romantique, il était passionné de liberté. Son émotion au cours des Trois Glorieuses est sincèrement ressentie et exprimée à
la gloire du peuple citoyen " noble, beau, et grand" .
Historique et politique, son œuvre témoigne, en combinant documents et symboles, actualité et fiction, réalité et allégorie, du dernier sursaut de l'ancien régime.
Symbole de la Liberté et la révolution picturale, réaliste et innovatrice, elle fut rejetée par la critique habituée à voir célébrer le réel par des concepts plus classiques. Le régime de
Louis-Philippe dont elle saluait l'avènement, l'ayant cachée au public, elle n'entre qu'en 1863 au musée du Luxembourg et en 1874 au Louvre.
Image de l'enthousiasme romantique et révolutionnaire, continuant la peinture historique du XVIIIème siècle, ce chef-d'œuvre est devenu universel.